Selon l’agence Bloomberg, le Groupe Renault discuterait activement avec le constructeur chinois Chery afin de produire et commercialiser des véhicules en Amérique du Sud. Cette région, en pleine mutation, représente pour Renault une opportunité clé à l’international, d’autant que Nissan, partenaire historique, s’est retiré de ce marché.
Une coopération industrielle au cœur du projet
Le premier axe du projet viserait la production locale. Chery pourrait fabriquer ses modèles dans les usines Renault installées en Colombie et en Argentine. La plupart des véhicules sortant de la ligne colombienne porteraient même le logo Renault, une stratégie de « rebadging » qui permettrait de consolider la présence du losange dans la région.
En Argentine, Chery réfléchirait à assembler un pick-up hybride. Ce véhicule inédit serait ensuite intégré au réseau de distribution de Renault. Il s’agirait d’un levier de croissance, alors que les utilitaires et les pick-up occupent une place stratégique dans les ventes sud-américaines.
Chery, un partenaire discret mais ambitieux
Chery reste peu connu du grand public européen, mais l’entreprise pèse lourd à l’international. Elle exporte déjà près de 40 % de ses volumes et multiplie les percées hors de Chine. Pour Renault, cette alliance permettrait de gagner en compétitivité, de réduire les coûts de production et d’accélérer son offensive face aux constructeurs chinois qui s’installent rapidement sur ce marché.
Le projet aurait été lancé sous l’impulsion de Luca de Meo, l’ancien directeur général, mais il reste piloté par l’actuelle direction. Contacté par Les Échos, Renault s’est refusé à commenter les informations.
Renault et Geely : un précédent au Brésil
Ce rapprochement avec Chery ne serait pas une première. En Amérique du Sud, Renault collabore déjà avec un autre géant chinois : Geely. Ce dernier a investi dans Renault do Brasil pour produire localement des véhicules. Geely détient également des parts dans Horse, la filiale dédiée aux moteurs thermiques, et dans Renault Korea Motors.
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Grâce à ce type de partenariat, Renault compense sa taille plus réduite par rapport aux mastodontes mondiaux. L’association avec Chery suivrait la même logique, avec une cible claire : l’Amérique du Sud, devenue un terrain de jeu privilégié des marques chinoises.
Nissan se retire, Renault occupe l’espace
Pendant que Renault cherche à renforcer ses positions, son ancien allié Nissan a choisi de se replier. Le constructeur japonais, confronté à des difficultés financières, a recentré ses activités sur des marchés jugés stratégiques : Japon, États-Unis, Mexique, Chine, Moyen-Orient et Europe.
Résultat : l’Argentine, autrefois envisagée comme un axe fort de coopération, a été abandonnée. Nissan devait initialement commercialiser un pick-up conçu et fabriqué par Renault en Argentine, mais ce projet a été annulé. Ironie de l’histoire, Nissan a même cédé son usine de Barcelone… au chinois Chery.
Trois milliards pour l’international
Pour Renault, la stratégie est à l’opposé. Le nouveau directeur général a confirmé, en marge du Salon de Munich, que l’Inde et l’Amérique du Sud figurent parmi les priorités de croissance. « Les Chinois ont lancé une offensive massive, mais grâce à Geely nous disposons d’une plateforme très compétitive », a-t-il rappelé.
Afin de consolider cette ambition, Renault a dévoilé fin 2023 un plan d’investissement de 3 milliards d’euros hors d’Europe. Objectif : lancer huit nouveaux modèles dans les segments les plus porteurs. Le SUV Kardian, déjà révélé, ouvre le bal.
Ce plan doit compenser la perte du marché russe, dont Renault s’est retiré en 2022, abandonnant 2,2 milliards d’euros d’actifs. L’Amérique du Sud devient donc un axe vital, et un rapprochement avec Chery pourrait en être le catalyseur.