Aussi bien en tant que pilote qu’en tant que constructeur, Bruce McLaren (1937-1970) aura connu aux 24 Heures du Mans un destin hors norme. Vingt-neuf ans après sa victoire sur Ford Mk II aux 24 Heures du Mans 1966, une voiture portant son nom s’impose à son tour dès sa première participation en 1995, avec la première GT haute performance de route de la marque, baptisée F1.
Lorsque naît la F1, McLaren est au sommet en Formule 1, avec huit titres consécutifs de 1988 à 1991. Et désormais une nouvelle ambition : concurrencer Ferrari, avec une routière à hautes performances conçue par Gordon Murray, l’un des ingénieurs les plus imaginatifs de l’époque.
DE MONACO AU MANS
La McLaren F1 est dévoilée lors du Grand Prix de Monaco 1992. Propulsée par un moteur V12 de 6 litres de cylindrée réalisé tout spécialement par BMW, elle présente la particularité de proposer trois places frontales, avec poste de conduite central décalé vers l’avant. Après la Seconde Guerre mondiale, cette idée avait déjà inspiré Jean-Pierre Wimille pour une voiture de route de sa conception, restée à l’état de prototype après sa disparition en 1949. Au total, la McLaren F1 est produite à 106 exemplaires de 1993 à 1998, dont 28 destinés à la compétition.
Suscitant l’intérêt de plusieurs équipes et pilotes, elle est déclinée en version course sous le nom de F1 GTR. Le 17 juin 1995, sept exemplaires sont au départ de la 63e édition des 24 Heures. Remarquablement agile sous une météo pluvieuse, elle remporte la course à la surprise générale, avec au volant le Français Yannick Dalmas, le Finlandais JJ Lehto et le Japonais Masanori Sekiya. Outre la voiture victorieuse, quatre autres F1 GTR sont à l’arrivée, dont trois dans le top 5 (troisième, quatrième et cinquième). Fin 1995, McLaren célèbre ce succès avec la production d’une série limitée à cinq unités (en référence aux cinq F1 GTR classées), baptisée F1 LM.
En 1996, la F1 GTR confirme sa belle fiabilité, avec cinq voitures dans le top 10, emmenées par Peter Kox, John Nielsen et Thomas Bscher, quatrièmes. A noter que deux F1 GTR sont engagées par l’équipe Bigazzi, partenaire de longue date de BMW. Elles terminent huitièmes et onzièmes.
BMW intensifie son implication, avec deux F1 GTR directement engagées par BMW Motorsport en 1997. Celle de Peter Kox, Roberto Ravaglia et Eric Helary termine troisième et seule des cinq F1 GTR engagées. « Cette voiture a été, après la BMW M1, la deuxième supercar dans laquelle notre marque a été impliquée, et son moteur a été chez nous une référence pour les cinq années suivantes, raconte Mario Theissen, Directeur de BMW Motorsport de 1999 à 2011. Ce moteur s’est avéré très compétitif en 1995, tout comme en 1996 et 1997. Nous avons donc pu construire un prototype autour. »
Ce prototype apparaît aux 24 Heures 1998, année de la dernière apparition sarthoise de la F1 GTR. Celle-ci s’offre un ultime top 5 pour sa dernière apparition aux 24 Heures, avec la quatrième place de Steve O’Rourke, Bill Auberlen et Tim Sugden. L’autre exemplaire engagé abandonne sur sortie de route. A son volant, on retrouvait deux futurs piliers de la saga Audi aux 24 Heures du Mans : les Italiens Emanuele Pirro et Dindo Capello.
UNE F1 ET SES PILOTES
Histoires de vainqueurs – Outre Yannick Dalmas, JJ Lehto et Masanori Sekyia les vainqueurs de 1995, la McLaren F1 GTR a été pilotée dans la Sarthe par neuf autres anciens ou futurs vainqueurs des 24 Heures : Derek Bell, Mark Blundell, David Brabham, Dindo Capello, Eric Helary, Jochen Mass, John Nielsen, Emanuele Pirro et Andy Wallace. Ces douze pilotes cumulent vingt-six victoires mancelles.
En 1995, JJ Lehto et Masanori Sekyia, les coéquipiers de Yannick Dalmas, sont respectivement devenus le premier Finlandais et le premier Japonais vainqueurs des 24 Heures du Mans. Ils sont accompagnés sur la troisième marche du podium par Derek Bell, associé à son fils Justin et d’Andy Wallace.
Formule 1, deux roues et circuit ovale – En 1996, un équipage de prestige termine en huitième position : le Brésilien Nelson Piquet triple Champion du Monde de Formule 1 en 1981, 1983 et 1987 ; le Vénézuélien Johnny Cecotto, double Champion du Monde de vitesse moto (1975 et 1978) brillamment reconverti en supertourisme ; et l’Américain Danny Sullivan, vainqueur des 500 miles d’Indianapolis en 1985.
Deux gentlemen pour la F1 – En 1995, le gentleman-driver et commissaire-priseur spécialiste des voitures anciennes Hervé Poulain dispute ses neuvièmes 24 Heures du Mans au volant d’une McLaren F1 GTR décorée par le sculpteur César. Il termine treizième, associé à Marc Sourd et Jean-Luc Maury-Laribière. En 1998, Steve O’Rourke (1940-2003), manager du groupe Pink Floyd, signe son meilleur résultat aux 24 Heures avec la quatrième place du classement général.
Aujourd’hui, McLaren est le seul constructeur à avoir remporté la Triple Couronne du sport automobile : 24 Heures du Mans, Championnat du monde de Formule 1 et 500 miles d’Indianapolis. Cette Triple Couronne sera saluée le 28 mai prochain, avec trois livrées commémoratives pour les trois monoplaces engagées par McLaren à Indianapolis.
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