La France et l’Espagne ont réaffirmé leur soutien ferme à l’interdiction des ventes de voitures neuves thermiques en 2035, posant une pierre angulaire du Pacte vert européen. Dans une note commune soumise en urgence au Conseil des ministres de l’Environnement de l’UE à Luxembourg, ils rejettent toute remise en cause de cet objectif zéro émission, au moment où l’Allemagne pousse pour un assouplissement. Une divergence qui cristallise les tensions sur la transition automobile.
Un positionnement inflexible
La lettre, révélée par le média Contexte et consultée par l’AFP, est catégorique : la révision prévue par la Commission européenne en 2026 ne devra « en aucun cas remettre en cause l’objectif de zéro émission » pour 2035. « L’échéance de 2035 est un repère essentiel pour le secteur automobile », plaident Paris et Madrid, soulignant que cette mesure, adoptée en 2022, guide les investissements des constructeurs vers l’électrique et l’hydrogène.
Cette prise de position survient après les déclarations choc du chancelier allemand Friedrich Merz début octobre, qui s’est engagé à « tout faire » pour lever l’interdiction, invoquant les coûts et la compétitivité des moteurs thermiques. Berlin, berceau de Volkswagen, BMW et Mercedes, craint un désavantage face aux concurrents chinois comme BYD, qui domine déjà les VE à bas prix. La France et l’Espagne, avec Stellantis et Renault, voient au contraire dans ce cap une chance de leadership européen en innovation verte.
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L’interdiction des thermiques neufs en 2035, adoptée en 2022 après des débats houleux, vise à aligner l’UE sur ses engagements climatiques : -55 % d’émissions d’ici 2030. Mais la réévaluation promise par la Commission pour 2026 ouvre la porte à des flexibilités, comme les e-carburants ou hybrides rechargeables, si elles atteignent le zéro net. L’Allemagne, soutenue par l’Italie, pousse pour ces échappatoires, arguant que 80 % des moteurs européens sont encore thermiques (ACEA). La France, avec 15 % de VE en 2024 (CCFA), et l’Espagne (20 % de production VE, selon l’ACEA) défendent un cap strict, voyant dans l’électrique un levier économique : 500 000 emplois verts prévus d’ici 2030 (ADEME).
Implications pour l’industrie
Cette fracture pèse sur les géants européens. Stellantis (Peugeot, Citroën) et Renault investissent massivement en batteries et VE (10 milliards € pour Renault en 2025), tandis que les Allemands, dépendants des moteurs essence (VW : 40 % de ventes thermiques, 2024), freinent. La note franco-espagnole, ajoutée à la dernière minute à l’ordre du jour du Conseil, vise à rallier d’autres pays (Pays-Bas, Portugal) pour contrer Berlin. Si elle passe, elle bloquera les assouplissements ; sinon, Euro 7 (2027) pourrait déjà ouvrir des brèches.
Verdict : une bataille décisive
France et Espagne tracent une ligne verte : 2035 reste intouchable, malgré les sirènes allemandes. Cette note commune, déposée à Luxembourg, cristallise un débat vital pour l’UE : innovation ou protectionnisme ? Avec 20 % des VE mondiaux (ACEA), l’Europe joue son leadership ; l’Allemagne, son modèle industriel.